Le Brownie Six-20 “art déco”

Une des premières brocantes d’importance (300 exposants annoncés) de l’année, à Ohey, jolie commune rurale du namurois.
Pour une fois, nous sommes arrivés tard (près de 8h30) et donc je ne m’attendais pas à trouver d’appareils intéressants, les “pirates” et les amateurs étant sans doute déjà passés par là.
Mais voilà, c’était sans compter sur un peu de chance, qui me fit découvrir l’appareil que je vais vous présenter, et un second, autrement plus petit, dans quelques temps.
Je l’ai déjà écris, d’habitude, je ne regardais pas spécialement ces box, parce que souvent dans des états lamentables : rouillés, cabossés, incomplets dans le meilleur des cas. Finalement, c’est celui d’Isabelle qui m’a fait craquer …
Mais ici, j’ai été attiré par sa boite, en cuir, en bel état, qui laissait présager un boitier n’ayant pas trop souffert : j’ouvre et je découvre un Brownie Six-20 avec une belle façade de style “art-déco” en très bel état, on dirait qu’il est neuf !
Je m’enquiers du prix, tout à fait raisonnable, et hop, dans le sac à dos.


Allons-y donc pour une présentation de ce bel objet à faire des photos.
Je ne reviendrai pas sur l’histoire déjà comptée des Brownie’s, que vous pourrez lire ICI.
Cet appareil est le digne descendant du Brownie Six-16, apparut aux Etats-Unis entre mai 1933 et avril 1941, qui donna naissance au Brownie Six-16 Junior. Mais comme il utilise du film 620, c’est l’appellation Six-20 qui est embossée sur la lanière de portage.
Heu, … pour vous donner une idée de la complexité pour s’y retrouver dans les dénominations et âges de ces box, allez voir ICI et LA.
S’il est plus simple que le Brownie Six-20 Model F que je vous ai présenté, il bénéficie déjà de quelques améliorations, que nous allons découvrir au fur et à mesure.
Il s’agit d’un Kodak fabriqué aux Etats-Unis et en Angleterre mais, s’ils ont la même dénomination, il sont singulièrement différents, tant dans la construction que dans la façade art déco. Par contre, tout les deux prendront huit photos de 6x9cm sur un film de 620 (ou un 120 modifié).
L’objectif du modèle US comporte deux zones de mise au point, exprimées en pieds : 5-10 pieds et 10 pieds et au delà pour le marché américain mais traduit en mètres pour les marchés d’exportation : 1,5m – 3m et 3m – infini.
C’est en bougeant un petit levier, situé sous l’objectif, de gauche à droite, que l’on modifie la distance. Ce qui n’est guère commode car la pièce ne tient pas, il faut maintenir le levier dans la bonne position sinon le ressort de rappel la remet à sa place initiale.




En fait, comme vous le voyez sur les photos ci-dessus, le mouvement du levier entraine le déplacement d’une lentille qui travaille comme une loupe.
Ensuite, sur le côté, une tirette et une languette.

La tirette (plié vers l’intérieur) sert à passer en pause B si vous la tirez vers vous, tandis que la languette, en dessous, c’est le déclencheur. La vitesse est le 1/50s, vitesse unique.
Attention, le déclencheur ne revient pas à une position initiale, en haut comme on le prévoit. Ce qui implique que si vous les descendez ou le remontez, il ouvre l’obturateur. Double expo garantie si on est distrait !
A noter encore, sur le côté droit, la manivelle pour faire avancer le film, au chargement et entre chaque prise de vue. Toujours pas de compteur de vue, mais une petite fenêtre en rouge inactinique pour voir défiler les signes et chiffres de l’avancement du film (et toujours pas facile à voir).


Sur le dessus de l’appareil, une troisième tirette :



Celle-ci modifie l’ouverture qui sera de f22(tirette en bas) ou f11 (tirette en haut).
Comme écrit plus haut, cet appareil utilise du film 620, en fait une bobine de 120 dont la taille de la tige est plus fine et plus petite, je l’ai expliqué dans l’article sur le Six-20 Brownie Model C. Il délivrera dont 8 photos de 6x9cm.
Autre particularité, les viseurs sont ici “clairs”, ce ne sont pas des verres dépolis comme le Six-20 Brownie Model C mais plutôt comme le Brownie Six-20 Model F (ça va, vous suivez toujours ?). Honnêtement, ça aide pour la visée, même si celle-ci relève toujours plus du “au pif” que de la visée chirurgicale et précise.
Maintenant, question cruciale : et on l’ouvre comment pour y mettre un film ?
Excellente question … au début, je pensais qu’il fallait soulever la fameuse tirette du haut, mais quand je ne suis aperçu de son action, je me suis trouvé fort dépourvu …
Et puis, en tirant sur tout ce qui dépassait, je l’ai fais avec le gros bouton chromé à l’avant, celui qui retient la lanière de portage, et là, ô surprise, en tirant sur la face avant, celle-ci s’est dégagée entièrement, libérant du coup tout le corps et la chambre de l’appareil.









Ce bouton est en fait une espèce de pointeau, monté su ressort, qui bloque la chambre dans son logement. Mais attention, pour pouvoir ôter toute la chambre, il faut impérativement aussi tirer la molette d’avancement vers l’extérieur (deux précautions valent mieux qu’une pour éviter les ouvertures accidentelles).
Une fois cette manipulation effectuée, vous vous retrouvez avec la chambre complète à l’extérieur. Toute en tôle fine, elle porte aussi sur le devant toute la mécanique de l’obturateur rotatif, des objectifs à glissement, les viseurs et autres joyeusetés que l’on vient de découvrir.
Ici, pas moyen de démonter quoique ce soit, tout est soudé.

Une étiquette, collée sur le métal, vous explique ensuite comment remettre les bobines dans le bon ordre, quels films utiliser et vous déconseille fermement d’essayer de mettre du 120 dedans. Et bien sûr, ne vous dit pas de mettre de l’Agfa dedans, mais du Kodak uniquement (on n’est jamais aussi bien servi que par soi-même).
Le corps de l’appareil, qui semble bien vide tout à coup, est en carton. Peint en noir et recouvert d’une espèce de simili cuir, il faut y faire attention pour ne pas briser les arrêtes, fines, qui tiennent finalement tout ensemble.
En fait, c’est aussi simple qu’un … sténopé, mais en plus évolué : une boite noire avec une surface sensible éclairée le temps dune prise.






Si cet appareil s’est vendu presque sans changements pendant près de huit ans (1933 – 1941), c’est qu’il rendait les services auxquels on s’attendait.
Pas ruineux à l’achat (la force du géant Kodak et les faibles coûts de fabrication), facile à utiliser, même pour des enfants, comme d’autres box, ce type d’appareil a ouvert la voie vers la démocratisation de la photographie.
-“Ouais, mais plus personne n’utilise ce truc pour faire des photos !”
Détrompez-vous et allez donc voir le compte Flickr des fans de box et de Brownie, vous serez étonné.
Si vous avez, finalement, envie de les rejoindre, dites-vous bien qu’il est aisé de trouver ces box, qu’ils soient Kodak ou d’autres marques (elles s’y sont toutes mises à un moment comme Agfa, Voigtländer, Zeiss, …) et à des prix encore ridicules.
Faites toutefois attention à ces quelques remarques :
- vérifiez que les viseurs soient clairs
- que l’obturateur fonctionne
- éventuellement aussi les lentilles accessoires (comme ici, elles doivent coulisser facilement, sans heurt et se mettre bien en place)
- si la boîte est en carton, qu’elle ne soit pas fendue, recollée
- si elle est en fer, qu’elle ne soit pas tordue
- et dans tous les cas que les parties s’emboitent parfaitement pour assurer une étanchéité complète
- qu’il s’agisse bien de Six-20 (film 620) ou, mieux, utilisant directement du film en 120. Il a existé des formats aujourd’hui disparus qui rendraient inutilisables l’appareil (six-16, film 616 par exemple)
- que la chambre soit intacte, avec au moins une bobine dedans (120 ou 620). Si elle était un peu rouillée, il faut la décaper et la repeindre en noir mat
- bien évidemment, que tous les accessoires soient présents ou réparables
Reste à faire le pas de sortir avec un tel appareil, mais, finalement, c’est le plus accessoire et dites-vous bien qu’il créera du lien car les personnes rencontrées seront étonnées/amusées/intriguées de vous voir utiliser un appareil qu’elles ont peut-être dans un grenier, une armoire et qui a, sans doute, alimenté les vieux albums photos familiaux.
Photographier avec un box, c’est toute une aventure, toute simple …
Laissez-vous tenter.
Petite pub d’époque (merci Collection-appareils)

Pour le mode d’emploi (mais en faut-il bien un ?), c’est par ICI.
Un peu de technique :
Type : Boîte de film en rouleau (box avec rollfilm)
Introduit: mars 1933
Arrêté: avril 1941
Taille du film : 620
Taille de l’image : 2 1/4 X 3 1/4′ (6x9cm)
Fabriqué : États-Unis
Objectif : Diway avec un objectif gros plan
Obturateur : Rotatif
Prix d’origine : 2,50 $
Des références : http://www.artdecocameras.com/cameras/kodak/six-20-brownie-e/, https://www.brownie-camera.com/index.shtml, https://camerapedia.fandom.com/wiki/Kodak_Six-20_Brownie, https://www.brownie-camera.com/65.shtml, https://www.brownie-camera.com/manuals.shtml (si vous cherchez des infos pour démonter et réparer) en anglais; https://www.collection-appareils.fr/x/html/appareil-290.html, http://www.appaphot.be/fr/brands/kodak/kodak-six-20-brownie/, en français