L’Agfa Optima Parat ou Sylverfish

Voilà le dernier appareil acheté lors de la foire de Villers Bretonneux.

Si généralement on connait Agfa pour ses camions d’appareils bon marché, comme Kodak, ils ont aussi produit des appareils innovants, aux solutions techniques élégantes, à l’esthétique soignée.

Cet Agfa Optima Parat, surnommé Sylverfish, en est un excellent exemple.

Cet appareil est apparu en 1964, en Allemagne et sera produit jusqu’en 1968.

Tout d’abord, c’est un demi-format, soit un 18×24. Si cela ne saute pas aux yeux quand on voit l’appareil pour la première fois, lorsque vous visez avec, vous êtes face à un viseur “en hauteur”, typique de ces appareils.

Tout en métal, très élégant avec cet aluminium brillant et légèrement nervuré sur la face avant, il est “carrossé” comme ces voitures de rêve ou ces caravanes légendaires des années soixante …

Mais ce n’est pas tout, au delà du plumage, il y a le ramage.

Tour d’abord, c’est un 24×36, qui double le nombre de vos photos puisque demi-format.

A ce sujet, il faut savoir qu’un film de 36 vues en donnera donc 72, un 24 vues, 48.

Comme ça risquait d’être long avant d’avoir terminé son film, Agfa a sorti un film baptisé Weekend, un 12 vues qui en donnait 24 ! Malin …

C’est un savant mélange entre la série Parat en 24×36 et les Optima, automatiques. Pour vous donner une idée de la gamme :

modèleproductionprixactualisé
Parat-I1963-68Version simple,
sans posemètre.
168 francs270,79€
Paramat1963-67Identique au Parat-I, mais avec réglage automatique de l’ouverture par le posemètre337 francs543,19€
Optima-Parat1964-68Appareil entièrement automatique, comme les Optima contemporains548 francs883,29€
Je suis confus, je ne me souviens plus d’où j’ai péché cette info, que j’ai légèrement remaniée.

Modèle haut de gamme donc de la série Parat, il est tout automatique et possède un objectif Solinar 30mm f2,8 (jusque f22) à quatre lentilles de haute qualité, sur lequel pouvait venir se monter un complément optique télé AGFA COLOR TELEPAR f2,8 de 55mm du plus effet et très rare. La mise au point minimale est de 0,9mètre. Le réglage de la distance se fait au moyen d’icônes ou selon une échelle gravée sur le fut.

Cet objectif équivaut à un 45mm en “vrai” 24×36.

Son obturateur, un Compur, offre des vitesses de 1/30s à 1/500s plus une pose B.

La cellule, au sélénium, le dispense de piles mais, hélas, elle s’épuise avec le temps, souvent.

Sinon, lorsqu’elle fonctionne, un voyant rouge dans le viseur signale une sous exposition, ou un voyant vert prévient que celle-ci est bonne.

De fait, lorsque vous appuyez à mi-course sur le déclencheur, le voyant adéquat s’allume et le boitier calcule l’ouverture et la vitesse optimale pour la prise de vue.

Heu … je vous rappelle que cet appareil date de 1964 !

Notons encore que l’automatisme est débrayable, ce qui le rend utilisable même lorsque la cellule est HS.

Le viseur est collimaté avec un cadre de visée pour le complément télé-objectif de 55mm et le signal rouge/vert, sur la droite qui signale l’exposition correcte.

Mais voyons comment il fonctionne de plus près.

Pour mettre un film dans la chambre, il faut déverrouiller le verrou sous la semelle. C’est tout le dos de l’appareil qui s’escamote. Notons la présence de gorges profondes pour glisser les deux parties l’une dans l’autre, assurant de la sorte une excellente étanchéité à la lumière. Remarquons aussi, en passant, la qualité des matériaux.

Une fois le film en place, ne pas oublier de noter la sensibilité de celui-ci, grâce à la molette au dessus de l’appareil. Celle-ci est exprimée en Asa et en Din (nous sommes en Allemagne). Une piécette est nécessaire pour tourner le bouton.

Ah, et n’oubliez pas de positionner le compteur sur le nombre de vues que vous allez prendre (pour rappel, un film de 36 = 72, un de 24 = 48, etc.). Le compteur va “décompter” les vues restantes au fur et à mesure des prises.

Il faut mettre le chiffre sur la flèche rouge, vous l’avez deviné.

Le petit levier d’armement à une course très courte, silencieuse, un régal. Et, ce qui ne gâte rien, il est particulièrement discret, bien intégré dans la carrosserie.

Le déclencheur est positionné sur la face avant. Il faut l’appuyer vers le bas pour prendre une photo. Particularité : si vous le descendez à mi-course, il enclenche la cellule qui vous donne le signal rouge (sous ex) ou vert (ok), puis vous appuyez à fond pour capter l’image.

Il manque une petite plaquette métallique sur le devant du déclencheur.

Toujours sur le dessus de l’appareil, un discret bouton marqué “R”, qu’il faut faire tourner pour pouvoir rembobiner le film en fin de course.

A côté, la griffe pour le flash, avec contact central pour la synchronisation au 1/30s.

Vous avez vu, c’est compact et bien étudié.

Sur la face avant, la large “fenêtre” qui cache le viseur et la cellule, tout à gauche (face à l’appareil). Celle-là, il faut la protéger autant que faire se peut de la lumière si l’appareil n’est pas utilisé, pour l’économiser (cellule au sélénium).

Le signal vert/rouge ne se met en route que sur le mode automatique. Je l’ai découvert par hasard, pensant que la cellule était HS. Quelle ne fut pas ma joie de voir apparaitre le point vert alors que j’avais changé la position de la bague de réglage sur A.

Comme on peut débrayer le mode, l’appareil déclenche quand même, ce qui m’a induit en erreur. Vous serrez alors sans doute au 1/30s sur f2,8.

Je reviens un moment sur les optiques présentes. Celle de base est un 30mm ouvrant à f2,8, un Agfa Color Solinar. Si vous regardez bien la photo ci-dessous, vous verrez une couronne crénelée. C’est sur celle-ci que se place le complément optique, qui se vise ensuite sur le pas intérieur de l’objectif.

Sans doute a-t-il existé un étui spécial pour remiser le complément optique car je me dis qu’avec la protubérance du bloc arrière, il faut le manipuler avec précaution (tiens, comme le Jupiter 12, par exemple). Comme je ne l’ai pas, je le laisse monté sur le boitier.

Et pour tout vous dire, c’est lui qui m’a fait de l’œil quand j’ai vu l’appareil pour la première fois : ce grand rond limpide, qui me fixait de son regard froid.

A savoir, un autre complément, un “close up” appelé Natarix, existait aussi, accompagné d’un viser spécifique.

Petite remarque utile me semble-t-il : la fenêtre de visée est en “mode portrait”, ce qui veut dire que si vous voulez prendre une photo en “paysage”, vous devrez tourner l’appareil en vertical !

Faire la mise au point est simplifiée, grâce aux symboles, qui sont reportés ensuite sur les distances (vous utilisez l’un ou l’autre).

L’avantage de ce système, c’est que vous pouvez vous positionner entre deux pictogrammes, la distance sera justement reportée en dessous pour plus de précision si besoin.

Dans le viseur, les lignes sont bien marquées. Elles délimitent le cadre de la photo au 30mm, plus celles (plus à l’intérieur) du 55mm et il y a encore des lignes pour la correction de la parallaxe en cas de photographie à courte distance, soit sous le mètre.

Sur la droite, le marqueur rouge/vert indiquant si l’exposition est juste.

Le mode d’emploi fait remarquer qu’il faut au moins une seconde au posemètre pour analyser correctement la luminosité, le temps d’appuyer à mi-course sur le déclencheur en fait (pas mal en 1964, sans pile !).

Maintenant, si vous devez utiliser le flash, vous devez quitter la positon automatique en tournant les bagues autour de l’objectif.

Petit résumé des fonctions de l’appareil

De ce que j’ai pu lire à son sujet, il est très intéressant de l’utiliser en mode automatique, ce pour quoi il a été conçu. En tout cas si vous avez un exemplaire dont la cellule est toujours fonctionnelle, comme ici.

Beaucoup de photographes s’amusent avec le demi-format pour constituer des diptyques, voire des triptyques (il n’y a pas de limite en fait). Vous remarquerez alors un demi-rond sur le négatif, qui est comme la signature de l’appareil.

Source : Photothinking

Vous trouverez encore des exemples de photos ICI.

Que retenir de cet Agfa Optima Parat ?

Il est agréable à tenir en main. On sent la qualité de sa fabrication au poids (470gr nu) sans que ce soit gênant Un peu glissant sans doute avec ce beau métal brillant, mais on s’y fait vite.

Au rayon des regrets, il n’est pas pourvu d’œillet pour y attacher une lanière. A l’origine, il était équipé d’un “sac tout prêt” en deux partie, qui possédait ces lanières de portage. Un trouver un serait un must.

Une solution intermédiaire serait de lui ajouter une dragonne fixée par en dessous, au niveau du pas de vis du trépied.

De toute manière, pour préserver sa cellule, il faut le remettre dans un petit sac lorsqu’on ne s’en sert pas.

Autre désagrément, la vitesse maximale des films est de 250Asa. A l’époque, les films n’étaient pas encore “rapides”. Il faut en tenir compte si vous achetez des films pour l’utiliser.

Au delà de son esthétique, que je trouve très belle – et pourtant, j’ai toujours un faible pour les boitiers en noir ! – et comme hors du temps, sa “mécanique” était à la pointe dans les années soixante.

A cette époque, Agfa, comme son concurrent Kodak, fabriquait encore des appareils solides, élégants, innovants.

Ne me faites pas écrire ce que je n’ai pas écris : les années qui viendront ensuite verront chez ces deux marques une quantité astronomique de petits appareils, faciles, bon marché, non dénués d’innovation, qui ouvriront au plus grand nombre les joies de la photo de loisir. Ce qui fut, en soi, une bonne chose.

Mais la qualité de ce modèle ne se retrouvera plus alors.

J’ai la chance d’avoir pu essayer et vous présenter un très beau modèle, toujours entièrement fonctionnel et, qui plus est, équipé d’un complément optique rare de nos jours.

En trouver un relève de la chance et le prix s’en ressent. Comptez au minimum 60€ pour un très bel exemplaire fonctionnel, au moins 100€ s’il possède un complément optique et plus de 150€ s’il est complet, c.-à-d. avec sa gaine, ses deux compléments optiques et le viseur du close-up.

Utiliser ce genre de boitier est une expérience qu’il faut tenter, pour le plaisir, rien que le plaisir.

Petite video d’illustration

Pour le mode d’emploi, c’est en dessous.

Quelques pubs d’époque (merci Collection-appareils)

Photo-Plait 1964
Grenier-Natkin 1965
Photo-Hall 1966, intéressant car montre les concurrents de l’époque.

Un brin de technique :

Production1963-1968 – AGFA AG
Type de film135
Format image18×24
BoîtierElégant boîtier en métal fondu entièrement garni de métal satiné ou chromé.
ObjectifCOLOR SOLINAR f:2,8/30mm. Mise au point par rotation de la frontale à partir de 0,9m (mètres, pieds et symboles)
Un complément télé AGFA COLOR TELEPAR f:2,8/55mm est prévu en option ainsi qu’un “close up” avec son viseur spécifique, le Natarix.
ViseurOptique, avec cadre lumineux + repères pour la parallaxe et repères pour l’utilisation du complément optique 55mm.
Signal vert dans le viseur indiquant la bonne exposition.
ObturateurCOMPUR automatique du 1/30e au 1/500e couplé à la cellule. Débrayable pour le flash et la pose B.
Déclencheur sur la face avant avec filetage pour souple ou retardateur mécanique
PosemètreCellule au Sélénium pilotant l’automatisme programmé de 1/30s à f2,8 au 1/500s à f22. Réglable de 12 à 24 DIN (max. 250 Asa) .
FlashSynchro-flash par contact central dans la griffe standard sur le capot. Système de réglage automatique par affichage du nombre guide dans une petite fenêtre sur le côté de l’obturateur.
Poids, dimensions 470 gr nu
DiversDeux petites fenêtres sur le dessus de l’obturateur laissent apparaître la valeur de diaphragme (en mode flash ou pose B) et le choix du mode : Auto, flash ou B.

Des références : https://www.philcameras.be/agfa-optima/, https://www.collection-appareils.fr/x/html/appareil-535-Agfa_Optima-Parat.html en français; https://photothinking.com/2020-12-16-agfa-optima-parat-half-frame-jewel/, https://johnnymartyr.wordpress.com/2018/11/01/a-rave-review-of-the-agfa-optima-parat/ en anglais; https://www.photo-foto.eu/agfa/agfa-optima-sensor/agfa-optima-parat/, en allemand

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