L’Agfa Ambiflex III

Et voilà l’avant dernier appareil acheté lors de la brocante de Champagne sur Oise de février 2023.

Ici, c’est du costaud, du lourd même, et du sophistiqué/compliqué !

Je vous avoue que j’ai tourné autour, ne sachant pas trop, et puis j’ai renégocié le prix avec le vendeur en fin de brocante, qui était bien content de ne pas devoir ré emporter ce gros bloc métallique !

Pourquoi ai-je hésité ? Il est complet avec sa gaine ou « sac tout prêt ». Un petit coup, pas bien méchant sur le prisme, une demi-plaquette de déco manque, la cellule fonctionne toujours. Mais il me semblait complexe.

Et puis, j’ai craqué car je ne recule jamais devant la difficulté et que la curiosité est toujours la plus forte.

Ensuite, un reflex de chez Agfa, ce n’est pas courant ! Tout le mode connait la marque, surtout pour ses appareils fournit pas camions entiers, au temps de sa splendeur, mais des réflex ?

En ben oui, fin des années cinquante (1958) et jusqu’au début des années soixante (1963), Agfa a commis cet Ambiflex, aussi appelé Agfaflex outre Atlantique.

Notez que si j’ai bien compris la chronologie de la marque au sujet des reflex, celui-ci est le premier, enfin, l’Ambiflex premier du nom. Il sera suivi d’un étonnant Flexilette (1960), un gros reflex bi-objectifs, comme les Rolleiflex (il coûtait d’ailleurs plus cher que ce dernier), mais c’est une autre histoire …

Source : Photojotings

Bref, après nous avoir submergé de folding, de box, de Click et de Clack, d’Isolette, d’Isoly et d’Isola, de Silette, innové avec les Optima, la firme sortait ses premiers reflex.

Et quel reflex !

Pour l’anecdote, comme Agfa n’a semble-t-il pas de documentation précise sur les chaines de productions de leurs appareils, il est difficile de dire si l’Ambiflex est le premier reflex de la marque. Une Selectaflex, de la même époque, utilise aussi des objectifs interchangeables et il semble même qu’il puisse utiliser certains des objectifs de l’Ambiflex

L’Ambiflex premier du nom (1959) – appelé Agfaflex III aux Etats-Unis – est un reflex mono-objectif, interchangeable, avec un viseur poitrine et cellule couplée au sélénium. L’objectif est un Color Solinar de 50 mm ouvrant à f2,8.

Le second Ambiflex (appelé Agfaflex IV aux Etats-Unis) gagne un prisme de visée mais garde le même objectif.

Le troisième, l’Ambilex III – encore appelé Agfaflex V au bout de l’Atlantique – celui qui va nous préoccuper, garde le prisme et la visée de poitrine (je vous expliquerai) et gagne un objectif Color Solagon de 55mm ouvrant à f2.

En même temps que l’Ambiflex, Agfa sort le Colorflex, un reflex à objectif fixe et sans cellule, l’entrée de gamme en quelque sorte des réflex du constructeur allemand.

Ce reflex est le concurrent direct du Zeiss Contaflex, du Kodak Retina et de Voigtländer.

Les trois Ambiflex sont équipés d’un obturateur Prontor Reflex qui donne une pose B et des vitesses de 1s à 1/300s. Petite particularité, l’obturateur est central (tiens comme le Mamya 528 TTL et plus proche de celui qui nous préoccupe, le Zeiss Ikon Contaflex Super, qui aimait aussi la difficulté et la belle mécanique).

Avec cet obturateur, l’ouverture est complète lorsque l’appareil photo est armé et n’est réduite à la valeur définie que peu de temps avant le déclenchement de l’obturateur. Cela signifie que la luminosité maximale est disponible lorsque vous regardez dans le viseur.

Si l’appareil n’est pas armé, impossible de voir dans le viseur, le miroir est en position haute. C’est un « volet » à ressort entièrement automatique et au jeu … complexe : le boitier non armé, l’obturateur est fermé et le miroir relevé donc. Lorsque vous armez, le miroir se baisse, un volet vient fermer la fenêtre image, l’obturateur s’ouvre et le diaphragme aussi, à la pleine ouverture. L’image n’est donc visible au viseur que jusqu’au déclenchement.

Ils sont en outre équipé d’une cellule au sélénium, visible dans une petite fenêtre sur le capot, à la droite du viseur. Cellule à préserver si elle fonctionne toujours, en la gardant dans le « sac tout prêt », dans le noir.

Il faut indiquer la sensibilité du film, en Asa ou Din (de 10 à 640 Asa) sur l’objectif, derrière la bague de diaphragme. Puis, en réglant ce dernier et/ou la vitesse, l’exposition est correcte lorsque l’aiguille de la cellule est alignée entre les deux repères.

Petit bémol : si vous utilisez le prisme, qui a le grand avantage de redresser l’image « dans le bon sens », vous devez le quitter pour voir la cellule.

Par contre, si vous utilisez le viseur de poitrine, vous gardez la maitrise du cadrage – enfin, là, ça se discute, surtout pour les gens comme moi qui n’arrivent pas à redresser l’image – et de la cellule.

Pour enlever et remettre ensuite le prisme, il faut appuyer sur les deux ailettes, au dessus, et le sortir par le haut.

Les objectifs Color Ambion 35mm ouvrant à f3,4 ou Color Telinear 90mm ouvrant à f3,4, et Color Telinear 135mm f4 étaient également disponibles.

Source : Udospickmann, de gauche à droite, l’Agfa Telinear 135mm f4, L’Ambion 35mm f4 et le Color Telenear 90mm f3,4

Que dire encore ? Il dispose d’un verrouillage contre la double exposition, d’un retardateur et d’une synchronisation du flash. Le flash doit être monté sur un accessoire (il n’y a pas de griffe) et relié au corps par un câble.

Enfin, il y a un filetage pour trépied et/ou accessoires.

En dessous de l’appareil, dans la ceinture qui le ceint, une roue dentée : c’est celle du compteur de vue, que vous devez régler sur zéro au départ d’un nouveau film.

Pour terminer, une particularité que je n’ai toujours pas comprise, c’est l’indicateur de profondeur de champ, constitué par un secteur noir plus ou moins visible dans une échancrure pratiquée sur la bague des distances, en fonction de la mise au point et de l’ouverture du diaphragme.
Noter aussi que les objectifs ne possèdent pas de bague de réglage du diaphragme, celle-ci est solidaire du bloc obturateur et transmet le réglage sélectionné à l’objectif par un jeu de leviers et de cames.

Si l’objectif est interchangeable, comme pour le Contaflex, c’est une partie de celui-ci que l’on ôte et remplace.

Pour le déverrouiller, puis le remettre en place, il faut appuyer sur un bouton, à gauche de l’objectif, sur la platine.

En résumé, un gros appareil, bien pensé, avec des solutions originales à défaut d’être très pratiques. Le métal est roi – et cela se ressent – et est usiné comme pour un concours Lépine.

Mais cela donne-t-il envie de s’en servir ?

Personnellement, je reste perplexe : trop lourd, pas assez ergonomique que pour être agréable à utiliser.

Même si je reconnais la technicité de l’ensemble, la qualité de celui-ci, celle des optiques, je reste – je crois – comme les rares acheteurs qui ont fait le pas dans les années soixante (le prix était plus que conséquent : environ 600 DM pour le boitier et jusqu’à 1400 DM pour le 50mm de base), dubitatif.

Il a plus sa place sur l’étagère d’un collectionneur que dans le sac d’un photographe moderne qui veut (re)découvrir les joies de l’argentiques.

Finalement, j’en viens à regarder d’un œil neuf les autres productions de la marque, dont les Optima, presque contemporains et totalement innovant (tout automatiques) et bien plus agréables à manipuler, voire même les Iso-Rapid, qui ouvriront la voie à la photographie de masse.

Je ne regrette pas cet achat, il m’a permis de découvrir, comme avec le Zeiss Contaflex, une autre vision de la riche fratrie des appareils de haute qualité, mais je n’ai pas envie de m’en servir.

Question prix, de nos jours, un bel exemplaire, complet (avec un objectif), ayant sa cellule toujours fonctionnelle et son sac tout prêt devrait se négocier autour des 90€.

Alors, si vous en trouvez un et avez envie d’expérience unique, laissez-vous tenter.

Petit résumé des images

Pour avoir une idée des qualités de l’appareil, c’est par LA.

Des pubs d’époque, toujours savoureuses (merci Collection-appareils)

Porst 1960
Photo-Plait 1961

Petite video d’illustration

Et une seconde

Un peu de technique :
Appareil photo reflex mono-objectif
Format de film 35mm
Objectif interchangeables, dotation 50 mm f2,8
Vitesse d’obturation de 1/300 s à 1 s plus pose B
Posemètre (cellule au sélénium) couplé à l’extérieur
Vitesses de film prises en charge 8 à 640 Asa
Pas de griffe flash
Connexion Flash PC
Support de trépied

Des références : https://en.wikipedia.org/wiki/Agfa_Ambiflex, https://camerapedia.fandom.com/wiki/Agfa_Ambiflex, https://filmphotography.eu/en/agfa-ambiflex/, https://photojottings.com/agfa-reflex-flexilette-review/,https://retinarescue.com/colorflex.html en anglais; https://www.collection-appareils.fr/x/html/page_standard.php?id_appareil=10023, https://www.cameraboussat.fr/dossier_collection/cible.php?id=70&marque=Agfa, https://www.philcameras.be/agfa-general/ en français; https://www.photo-foto.eu/agfa/agfa-ambiflex-i/, https://www.udospickmann.de/agfa-ambiflex, https://www.kamera-museum-scholz.de/agfa-kamera/spiegelreflexkamera/ambiflex/, https://kameramuseum.de/objekte/agfa-ambiflex/ en allemand

2 commentaires sur “L’Agfa Ambiflex III

  1. C’est un OVNI, ce reflex ! Je ne pense pas en avoir déjà vu. Je suis d’accord, c’est davantage un objet de déco qu’un appareil pour débuter en argentique.

    • Je t’avoue que j’en ai découvert 2 lors de la Bourse du 02 avril et qu’ils étaient tout aussi impressionnants. Réservé aux esthètes à mon avis. Bien amicalement Fred.

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