L’AutoProcessor Polaroïd

Si Polaroïd est surtout connu pour l’invention du film à développement instantané, né du désir d’une petite fille de voir « tout de suite » la photo captée et de quelques années de développement par son ingénieux papa, c’est aussi une entreprise qui a voulu offrir du plaisir à photographier facile, à défaut d’être (toujours) abordable.

Je ne vais pas vous raconter l’histoire de la marque, que vous trouverez aisément sur la Grande Toile, mais d’une (autre) très bonne idée qui, malheureusement, n’a pas eu de descendance …

Car, voyez-vous, l’argentique nécessite de développer le film pour voir ce qui a été figé sur l’émulsion aux sels d’argent.

Et c’est parfois là que le bat blesse car : tout le monde ne sait pas développer un film pour diverses raisons, tout le monde ne peut pas trouver (surtout de nos jours) un labo près de chez soi.

Eh bien Polaroïd avait une solution !

Pour vous l’expliquer, je remonte quand même un peu en arrière : 1977, Polaroïd présente un concept extraordinaire pour l’époque, un film 8mm présenté en cassette spécialement conçue pour le procédé contenant la chimie nécessaire à son développement en 90 secondes.

Vous aviez besoin d’une caméra 8mm (sans le son) et un lecteur/projecteur dans lequel vous introduisiez la cassette. Vous visionniez le film projeté en retro-projection sur un écran.

Génial, non ?

Sauf que … la qualité du 8mm était moins bonne que celle du Super 8, le film était muet et n’était visible que sur l’écran du système. Mais, plus embêtant, la video commençait à gagner du terrain auprès du grand public et elle allait balayer les films 8mm et Super 8 qui demandaient un développement !

Lancé trop tard, pas assez abouti, ce fut un échec commercial, qui entraina Eumig, la firme autrichienne qui fabriquait la caméra et le projecteur dans une faillite dont elle ne se relèvera pas

Je vous laisse découvrir le procédé dans cette video (en anglais, songez à la mettre en français dans les paramètres)

Polaroïd aussi a eu chaud, mais la compagnie est encore solide à cette époque.

En 1983, fidèle à ses idées de développement rapide, à défaut d’être instantané, elle lance un film 35mm destiné à la diapositive (vous savez, ces photos que l’on projette sur un écran, celles de la famille que vous avez retrouvées par hasard dans le grenier de vos parents ou grands-parents !).

Chaque rouleau de pellicule est accompagné d’un petit paquet de produits chimiques, destinés au développement, que vous allez faire vous-même !

Pas de panique, vous ne devrez pas condamner la salle de bain, installer une chambre noire quelque part dans la maison car Polaroïd a pensé à tout.

Il a développé l’Autoprocessor, une mini chambre noire portative qui permet de développer un film 35mm Polachrome en moins de 10 minutes.

Initialement développé pour pouvoir tirer rapidement des diapositives de « présentation », ce film – et d’autres développés expressément pour ce système, dont du N/B – a tôt fait d’attirer les particuliers … pressés de montrer leurs œuvres !

Le film le plus connu était donc le Polachrome, disponible en couleur, monochrome (Polapan) et même bleu (Polablue – destiné à des usages particuliers).

Chaque film était donc vendu avec une cartouche contenant la chimie nécessaire au développement.

En fait, en enroulant le film et la bande de développement contenue dans la cartouche ensemble dans l’Autoprocessor, le développement se fait en quelques minutes, à la lumière du jour puisque les deux bandes (film et produits chimiques) sont enfermées dans l’appareil, étanche lui à la lumière.

Bon, si le principe est splendide – l’idée en tout cas me plait beaucoup – les résultats étaient-ils à la hauteur ?

Disons que c’était suffisant pour découvrir valablement ses images rapidement mais la résolution n’était pas aussi bonne qu’avec un film conventionnel et un développement « normal ».

La bande de produits chimiques était constituée d’une matrice de minuscules filtres rouges, verts et bleus qui faisaient réagir l’émulsion du film Polachrome (principe de couleur additive). La sensibilité du film n’était pas très élevée (environ 40 Iso)

« Les films additifs (tels que les films diapositives Polavision et Polachrome) utilisent un masque de couleur de lignes rouges, vertes et bleues transparentes microscopiquement minces (3000 lignes par pouce) et une couche d’émulsion noir et blanc pour reproduire des images couleur dans un film transparent. Les révélateurs de colorants résultants (émulsion non exposée) bloquent les couleurs inutiles et projettent la couleur ou la combinaison de couleurs qui se forment dans l’image résultante. Étant donné que les lignes sont si proches les unes des autres, l’œil humain a facilement mélangé les couleurs primaires pour former la bonne couleur, un peu comme un écran LCD ou une télévision. Par exemple, une photo d’une fleur jaune exposerait l’émulsion sous les masques rouge et vert et non le masque bleu. Le processus de développement a éliminé l’émulsion exposée (sous les masques rouge et vert) et a diffusé le révélateur de colorant non exposé (sous le masque bleu) sur sa couche réceptrice, empêchant la lumière de passer. Cela a eu pour résultat que la lumière projetée brillait à travers les masques rouge et vert mais pas le masque bleu, créant la couleur jaune. En raison de la densité du film, les vitesses des films étaient nécessairement lentes. Une grande précision était requise pour la production de ce film. » (source Wikipedia)

Une fois le film développé, il vous restait à monter les dias et à les projeter (tous les projecteurs étaient compatibles)

Les films ont été produit en grande quantité, les professionnels aimant beaucoup les utiliser pour faire des essais de prise de vue. Ils seront produit pendant près de vingt ans.

Malheureusement, il devient difficile d’en trouver de nos jours qui soient encore exploitables.

Si je vous montre l’exemplaire de l’Autoprocessor que j’ai récemment acquis, c’est parce que j’aimerais le confronter à un système plus moderne mais qui va un peu dans le même sens : il s’agit du Lab-Box, que je vous présenterai sous peu.

En fait, ce que j’apprécie avec ce système, c’est cette faculté de développer soi-même, sans devoir investir dans une chambre noire. En fait, je déteste travailler à la lumière rouge dite inactinique et je n’ai pas la place pour installer une pièce dédiée.

Donc, à défaut d’utiliser l’Autoprocessor de Polaroïd, je vous montrerai l’utilisation du Lab-Box.

Ceci étant, je regrette que l’on ne puisse faire « repartir » cette belle machine et réutilisant le principe, quitte à le modifier un peu, en imaginant des solutions chimiques contenues dans une cartouche comme celle de Polaroïd.

Tiens, chez Lomography, y a pas des chimistes doués ?

Une video d’illustration qui explique vraiment bien le processus et le résultat (merci EMGK Photographie – Photographe argentique)

Et quelques autres pour compléter votre information :

Des références : https://www.instantphoto.eu/pola/pola_autoprocessor_35mm.htm, https://en.wikipedia.org/wiki/Polavision, https://web.archive.org/web/20050510080051/http://www.people.umass.edu/jpalma/instant_slide.html en anglais, https://fr-fr.facebook.com/imagesdargent/posts/2669956563247136, https://boxargentique.fr/un-projet-fou-le-polaroid-polachrome/, http://pics.idemdito.org/fr/tech/film/pola.htm en français

2 commentaires sur “L’AutoProcessor Polaroïd

    • Mais parfois ces belles idées sont tombées en désuétude et restent lettres mortes … en ce qui concerne cet appareil, il est encore possible de trouver des films mais ce serait vraiment intéressant de recréer une chimie pour l’utiliser encore.
      Je vais essayer bientôt – les longues soirées d’hiver sont là – un système plus moderne et compatible avec tout type de film, A bientôt sur nos sites respectifs. Mes amitiés Phil.

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