Le Minox 35 GT

Ah, si je vous dis que j’ai déjà eu toute la collection des Minox, me croirez-vous ?

Ben oui, c’était avant que ne me vienne l’idée de la création du blog. Je les avais acheté à un charmant vieux Monsieur qui ne pouvait plus s’en servir à cause d’une vue déficiente et de ses doigts que l’arthrite gagnait inexorablement.

Après les avoir tous essayés, je les ai revendus les uns après les autres car je les trouvais bien sympathiques mais peu maniables. Et si vous vous en souvenez, j’ai même fait un article sur le Chinon Bellami où je racontais cette anecdote.

Le Chinon a suivi le même chemin, tout comme l’Olympus XA et le XA-2, et quelques autres qui, s’ils étaient minuscules quoique performants, me ne permettaient plus d’y voir assez clair pour bien m’en servir. Place aux jeunes !

Mais revenons un instant sur la saga de cet appareil, qui étonne encore par sa compacité, sa qualité de fabrication et celle des images qu’il délivre.

Source : http://www.submin.com/35mm/manuals/minox/

Il faut bien chercher pour trouver qui dépose les premiers brevet de cet appareil passionnant : c’est un bureau en ingénierie (Krull & Co GmbH Ernst) qui dépose, pour Minox, un brevet pour un appareil avec abattant et objectif rétractable. Nous sommes en février 1974.

Ensuite, la construction de l’appareil sera confié à Balda, Minox n’ayant pas l’expérience d’une fabrication à base de plastique. Les Balda CE 35 et CA 35 sont d’ailleurs très proches du premier Minox, le 35.

Par la suite, Ricoh déposera encore des brevets pour faire progresser le concept, en 1978 – 1979. Ce sera d’ailleurs un jeu de va-et-vient entre les deux marques, chacune apportant une modification pour peaufiner le principe.

Source : Collection-appareils, qui vous livre toute l’histoire des brevets.

Pendant près de 25 ans l’appareil évoluera par petites touches, au gré de la capacité à miniaturiser toujours mieux certains composants, dont l’électronique.

Source : Minox35mm pour avoir une idée des différent modèles.

Pourquoi le Minox 35 ? Le Rollei 35 fut longtemps l’appareil le plus compact jamais fabriqué (excepté les appareils « espions », dont Minox était le spécialiste) utilisant une pellicule de 24x36mm. Nous étions en 1966.

Dans les années septante, la technologie des plastiques à permis de fabriquer des appareils plus légers, plus résistants que ceux tout en métal. Les formules optiques ne sont pas restées en reste, ni, évidemment, l’électronique, celle des obturateurs en particulier.

Voilà pourquoi Minox propose, en 1975, un appareil plus petit, plus léger, avec une exposition automatique et des contrôles d’exposition plus variés que le Rollei 35. Plus question non plus de se battre avec un objectif rétractable et une gymnastique bizarre pour armer l’appareil. Voilà le Minox 35 EL qui pointe le bout de son abattant, celui qui protège si bien l’objectif.

C’est le début d’une aventure avec plus de 22 modèles (et des séries spéciales) qui représenteront environ 2 millions de boitiers sur les 25 ans de fabrication du nouveau mythe.

Le Minox 35 GT sera sans doute le plus populaire. Je suis donc très content d’en avoir trouvé un sur une brocante bruxelloise, dans sa boite et avec un mode d’emploi en allemand (j’en ai trouvé un en français par après).

Le vendeur m’a expliqué que cet appareil l’avait accompagné lors de nombreux voyages, notamment au Vietnam et au Cambodge, où il faisait merveille car il se glissait réellement dans une poche de chemise et restait très discret.

Il vient sur le marché en 1981, après le EL et le GL. Dans la liste des améliorations, il apporte un retardateur électronique, avec une LED clignotante au-dessus du nom de l’appareil photo, un levier d’armement remanié.

Petit mais bien pensé : toutes les commandes sont au bon endroit, facile d’accès, mais à la taille de l’engin, soyons réaliste.

Ah, une petit astuce pour reconnaitre les différents Minox : la couleur de leur déclencheur ! En effet, pour différencier les séries d’appareils, il avait chacun une couleur différente. En vrac : le PL est vert, le GT est orange, le GT-E est rouge, le ML est jaune, le AL est blanc, il y eut même un déclencheur en or, sans compter sur les séries spéciales qui viennent parfois brouiller les pistes !

Avant d’entamer la présentation, une remarque : à l’origine, la pile du 35 GT était au mercure, une PX 27 de 5,6 volts. Elle peut être remplacée par une S27PX mais qui fait 6v ou plus simplement par des SR44 (ou LR44). Une correction peut être nécessaires Il existe différents adaptateurs, dont un fournit à l’époque par la marque. Les autres sont régulièrement en vente sur Ebay (Minox 35 battery adapter).

Source : https://www.thingiverse.com/thing:2980519
Ici avec l’adaptateur d’époque.

Fabriqué en Makrolon, un plastique particulièrement résistant, renforcé de fibres de verre, il est très léger et solide. Même sans trop le ménager, vous ne verrez pas vite les affres du temps s’inscrire sur ce petit corps tout en rondeur. Au fait, la couleur noir mat est nécessaire car la fibre de verre à tendance à être « brillante ». Il fallait donc la neutraliser pour éviter des soucis lors des prises de vue.

Le rabat, qui protège l’objectif sert aussi d’interrupteur car lorsque vous le descendez, il fait sortir l’objectif, met en route la cellule et arme le déclencheur. Si l’abattant est fermé, impossible de déclencher.

Tout d’abord c’est un petit appareil tout automatique, un priorité ouverture. Vous la réglez et il donne la vitesse pour une bonne exposition.

Pour le réglage des distances, c’est un zone focus. Le télémétrique viendra plus tard. Ici, vous estimez une zone de mise au point et selon l’ouverture choisie correctement, avec les effets voulus (bokeh ou grande zone de netteté, selon les sujets).

Attention, ça veut aussi dire que vous devrez contrôler la vitesse indiquée dans le viseur pour éviter les sur expositions (au delà du 1/500s) et les risques de flou avec une vitesses trop lente (sous le 1/30s).

Vous constaterez que l’anneau autour de l’objectif, s’il est petit, est relativement épais. Personnellement, je regrette qu’il n’y ait pas de « clics » qui confirme la position.

Même chose pour la bague des distances, à l’avant. Si elle est facile à manœuvrer, elle peut aussi rapidement se dérégler.

L’objectif est un Color-Minotar 35mm ouvrant à f2,8, formule Tessar à 4 lentilles en 3 groupes. Tous les auteurs reconnaissent la qualité de ce dernier, tant au niveau de la neutralité des couleurs que de sa restitution des détails pour autant qu’on l’utilise de f5,6 à f11, au delà et en deçà il perd de sa vigueur sur les bords surtout. Sa distance minimale de mise au point est de 90cm.

Si cette manière de travailler (le zone focus) est parfaite pour la photo de rue, elle le sera moins pour d’autres techniques, comme le portrait, qui demande une mise au point parfaite. Là, ça va être plus compliqué, voire impossible.

Idéalement, il faut utiliser des films de 100 à 400Asa maximum et rester dans la fourchette de f5,6 à f11. De cette façon on reste dans les limites de l’obturateur même en cas de soleil. Les films trop lents vont demander des ouvertures trop grandes avec un risque de mise au point trop aléatoire.

A noter que la cellule est située autour de l’objectif. Je devrais écrire les cellules car de fait il y en a deux : une pour l’affichage des vitesses et une seconde pour le réglage de l’obturateur. Elles travaillent de concert pour donner une exposition correcte.

L’exposition est une mesure globale. Comme le Minox est réputé pour être sensible aux contre-jours et aux lumières parasites, il y a une petite touche bien utile, la touche X2 qui permet de surexposer d’un diaphragme.

Comme je le notais, il faut utiliser des piles modernes, qui donnent 6v et non plus 5,6v. Il est conseillé de vérifier si cela influe sur la mesure de votre exemplaire, c’est variable.

La solution simple c’est de tromper la cellule en affichant un réglage ISO plus bas ou plus haut selon le cas.

Imaginons que votre Minox GT sous-expose : il faut le caler à 64 ISO pour un film 200 ISO, ce qui donne +1,7 diaph de correction. Le réglage de la sensibilité se fait avec une roue qui se trouve au milieu d’un cadran avec les chiffres en Din/Asa. Là malheureusement la peinture s’en va plus vite qu’ailleurs et il devient impossible de lire les informations (comme sur mon exemplaire). Il est conseillé de se refaire une grille à coller à la place de celle d’origine devenue inutile.

Réglage ISO d'un Minox 35
Affichage à 64 ISO pour un film 200 ISO.

L’obturateur est électronique donc sans piles, pas de photo. Le logement de celles-ci est sous l’abattant donc aisées à changer. Ça a l’air évident mais une remarque importante à faire ici : si les piles sont vides, vous aurez l’impression de pouvoir déclencher (vous entendrez un « clic » discret) mais en fait l’obturateur ne s’ouvrira pas. Pour éviter ses désagréments, il y a un testeur de pile sur le dessus.

L’obturateur se déclenchera entre 1s et 1/500s, mais avec des durées plus longues pour les films à faible iso. Ainsi, pour un film 25Iso, le Minox maintiendra l’obturateur ouvert pendant 15 secondes maximum. Mais le meilleur, c’est que l’obturateur, central, est incroyablement silencieux et totalement exempt de vibrations.

Le levier d’armement, bien intégré au design de l’ensemble demande un mouvement en deux temps (il arme en deux demi-mouvements). Il entraine aussi la protection contre la double exposition si vous ne faites pas avancer le film après un déclenchement.

Bien que petit (et orange), le déclencheur tombe naturellement sous l’index. Mais il est trop souple et comme l’appareil est particulièrement silencieux, on peut appuyer dessus pour inadvertance et gâcher de la pellicule. Remarquez le petit trou juste à côté, sur le capot : c’est l’emplacement pour viser un câble de déclenchement souple.

Un mot aussi sur le viseur, lumineux et confortable malgré la petite taille de l’ensemble. Les lignes de cadre, tout comme l’indicateur de vitesses, à droite, ne seront sans doute pas toujours bien visibles mais ils existent bien. Les porteurs de lunettes surtout risquent de le trouver moins agréable.

Source : https://tdacunha.com/minox-35-gt-utilisation-reparation/

Vous l’aurez remarqué,il y a une griffe pour le flash, avec contact de synchro au centre. Vous ne pourrez, normalement, pas y monter n’importe quel flash mais bien ceux dédiés aux différents modèles, et ils ne sont pas tous compatibles entre eux.

Source : http://www.submin.com/35mm/collection/minox/

Le flash prévu pour ce modèle est le Minox FC-35

Il faut bien reconnaître qu’une fois le flash monté sur l’appareil, il n’a plus rien de minuscule, celui-ci étant quasi aussi grand que le boitier. Peu de gens s’en sont servi à cause de cela. C’est encore un peu le cas du tout petit Pentax 110 qui, affublé de son flash, fait deux fois plus grand. Celui de l’Olympus XA, qui se branche sur le côté, rend l’ensemble moins imposant. Le Balda CE35 avait aussi choisi cette solution, qui préserve la silhouette de l’ensemble.

Ce tout petit appareil pouvait aussi compter sur une série d’accessoires : un flash, un trépied, une gaine, etc.

Source : http://www.submin.com/35mm/manuals/minox/

Pour charger l’appareil d’un nouveau film, il faut déverrouiller, en dessous, le gros verrou sur la semelle. Attention, c’est tout le dos qui s’escamote. Ensuite, il suffit de glisser une bobine à gauche, de tirer l’amorce jusqu’à la bobine réceptrice à droite, la glisser dans les fentes et armer au moins deux fois avant de tout refermer. Soyez attentif à bien remettre le dos dans les rainures avant de reverrouiller le verrou, pour ne pas forcer. Ensuite, encore deux armements/déclenchement et vous êtes prêt pour vos premières images.

Alors, que penser de ce Minox GT ?

Pari tenu, il tient dans une poche de chemise, sans trop la froisser !

Il a un charme certain et son design semble assez intemporel. Il a été bien pensé et séduit toujours.

Pourtant, il n’est pas exempt de défauts : le déclencheur, trop sensible ; le viseur, pas très lisible ; le changement de pile qui demande des adaptations pas évidentes aux non-initiés ; s’il est solide, il n’est pas étanche à la poussière et à l’humidité, il faut donc y faire très attention ; il n’y a pas la possibilité de fixer une dragonne pour le porter. C’est donc dans la poche ou dans un petit sac (pas facile à trouver en occasion) fait expressément sur mesure, car c’est lui qui porte la sangle. Enfin, le défaut de sa qualité : il est (tout) petit et dès lors pas simple à régler quand on a des problèmes de vue ni des gros doigts.

Reste que comme tous les mythes, ses défauts deviennent comme des signatures et ceux qui veulent en posséder un n’en ont cure.

Reste à se demander si les prix sont bien réalistes : on frôle parfois les 200€ pour un très bel exemplaire mais il faut compter plus de 100€ pour les autres. Un peu comme son concurrent de toujours, l’Olympus XA, qui partage les mêmes avantages et inconvénients, in fine.

Petite revue en images :

Petites videos d’illustration :

Bref résumé technique :

  • Appareil photo compact de type 35 mm
  • Taille 100 mm x 61 mm x 31 mm (L x H x P)
  • Poids 200 grammes (avec batterie)
  • Format d’image 24 x 36 mm (L x H)
  • Objectif Minox Color-Minotar, 35 mm f/2.8, sans filetage de filtre (les filtres propriétaires se clipsent).
  • Diaphragme à lames, réglable en continu de f/2,8 à f/16.
  • Mise au point grâce à une échelle sur l’objectif mettant au point de 0,9 m à l’infini.
  • Vitesses d’obturation 1/500 seconde, vitesse la plus longue dépendant de la sensibilité du film, par ex. 15 secondes à 25 ISO, 1 seconde à 400 ISO. Correcteur d’exposition +2
  • Viseur direct avec échelle à aiguille, marquages ​​pour 1/500, 1/125, 1/30 seconde, zones pour indiquer une surexposition et avertissement de vitesse lente.
  • Chargement manuel du film, tout le dos glisse pour charger la bobine
  • Transport du film par levier à double course.
  • Flash Contact Griffe, X synchronisé, commutation automatique du temps à 1/90s
  • Douille pour trépied 1/4″
  • Batterie PX 27 au mercure à remplacer par 4xLR44 – SR44 empilées

Les références si vous deviez démonter : https://www.modesdemploi.fr/minox/35-gt/mode-d-emploi?p=4

Des références : https://benber.fr/revue-express-minox-35-gt/, https://www.danstacuve.org/minox-35-gt-petit-mais-costaud/, https://collection-appareils.fr/x/html/appareil-33-Minox_35%20GT.html, https://www.jeanchristophewiart.com/analog-trip-to-berlin/, https://tdacunha.com/minox-35-gt-utilisation-reparation/, https://www.club-niepce-lumiere.org/fondamentaux-54-les-minox-35-a-mise-au-point-manuelle/ en français ; https://www.analog.cafe/r/minox-35-gt-camera-review-0kl1, https://www.35mmc.com/11/01/2019/minox-35-gt-guest-review/, https://www.35mmc.com/02/02/2021/minox-35-gt-e-review-scale-focusing-a-pocket-camera-by-anton-yakovlev/, http://camera-wiki.org/wiki/Minox_35_GT, https://www.lomography.com/magazine/127748-minox-35-gt-a-must-have-camera-for-its-time, http://www.submin.com/35mm/collection/minox/, http://www.submin.com/35mm/manuals/minox/ (une mine d’informations) en anglais.

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