L’Agfa Billy Record

Ici nous avons affaire à un ancêtre car cet appareil date de 1933.

Je vous avais déjà présenté l’Agfa Billy – Clack 74 qui datait aussi du début des années trente.

La différence entre ces deux ancêtres est la manière dont ils s’ouvrent : un bouton sur lequel on appuie pour le Clack et qui libère avec le même bruit le soufflet, automatiquement ; un levier discret, sur le devant de la porte du Billy-Record, qu’il faut tirer doucement pour déplier le soufflet.

Ce Billy-Record 7,7 sera suivi, en 1938 d’un Billy-Record 88 (objectif Agfa Anastigmat Jgestar/Igestar f8.8/105mm ou Jgestar/Igestar 8.8/100mm) puis d’un dernier Billy-Record 4,5 en 1940 (objectif Apotar f4.5/105mm ou Solinar f4.5/105mm avec un obturateur Prontor II qui offrait les vitesses de 1S à 1/150s et une protection contre les doubles expositions).

Cet appareil fait partie de ceux qui ont permis l’essor de la photographie, adressés aux photographes amateurs, comme les Box et folding de Kodak, les pliants de Voigtländer ou Zeiss Ikon, par exemple. Ils utilisaient du film en bobine de 120 pour un tirage de 6x9cm. Avec ce format, il n’était pas utile d’agrandir les images car un simple développement par contact suffisait pour délivrer une photographie de 6×9 cm. Vous avez sans doute déjà vu, dans de vieux albums, ces images aux bords découpés : on utilisait une simple paire de ciseaux crantés.

Au vu des données ci-dessus, nous sommes bien en face d’un appareil aux possibilités réduites mais néanmoins, il a « du style » et vaut la peine d’être présenté.

D’autant que ce modèle présente des côtés dans le style « art déco » du plus bel effet.

Partons du principe qu’il est toujours utilisable et que nous allons y installer un film.

Pour ouvrir le dos, il faut appuyer sur l’espèce de réglette placée sous la lanière de portage. Heu … pas facile car il faut presser sur la réglette et tirer en même temps la porte vers soi, et l’âge n’arrange pas la fluidité du verrou (une lame de métal qui fait ressort).

Si vous voulez refermer l’appareil, appuyez sur les genouillères vers le bas et le mécanisme se libère, permettant de replier le soufflet. Ne brusquez pas la manœuvre, ces vieux soufflets sont parfois devenus fragiles, nous y reviendrons.

Pour le reste, il faut glisser la cartouche de film dans le logement vide, à gauche (vue de la chambre) en soulevant les deux leviers de calage de la bobine. Puis tirer l’amorce jusqu’à la bobine réceptrice que l’on insert en soulevant la molette de bobinage.

Il faut enrouler le film jusqu’à l’apparition du témoin de début de film. Refermer le tout et continuer à tourner lentement jusqu’à l’apparition du chiffre 1, que l’on voit à travers la fenêtre en rouge inactinique. Fenêtre qui sert aussi, vous l’avez compris, de compteur de vue rudimentaire. Pour éviter les fuites de lumière par temps très ensoleillé, on peut refermer un petit panneau devant la fenêtre.

Voilà, le film est en place, nous allons pouvoir commencer la prise de vue …

Holà, holà, prenons le temps car ici tout est manuel.

Pour régler la distance, ne comptez pas trop sur le viseur qui n’est finalement qu’un accessoire pour cadrer sa photo, à peu près. Sur le modèle que je possède, il manque le viseur de côté, un viseur à prisme, toujours aussi imprécis que l’autre.

De toute manière, vous n’aurez que deux choix : de 2m à 5m et de 5m à l’infini. Vous faites ce réglage en faisant coulisser une tirette sur la droite de l’objectif (vu de face). Attention, lorsque vous refermez l’appareil, il revient d’office à la distance 5m – infini. Vérifiez toujours ce curseur avant de prendre une photo proche.

Pour l’ouverture, vous aurez le choix entre f7,7, f11 et f16, là aussi en faisant glisser un curseur.

Quant aux vitesses, elles s’échelonnent de 1/25s – 1/50s – 1/100s et une pose B, toujours en faisant glisser un curseur. Petite astuce, pour actionner la pose B, il faut faire glisser le curseur sur la lettre et maintenir appuyé un petit levier qui maintient le déclencheur en partie basse, c’est-à-dire en ouvrant l’obturateur. Il restera ouvert aussi longtemps que vous maintiendrez ce levier appuyé ou le câble souple enfoncé.

Rappelez-vous qu’à l’époque les films étaient très lents (10 à 50Asa maximum) et donc ces vitesses étaient suffisantes, tout comme les ouvertures.

Revenons aux réglages des distances : Agfa considère que la distance 2m – 5m est celle pour les portraits. Le réglage de l’objectif assure que tous les sujets dans cette distance seront nets. Les autres sujets, comme les paysages, seront nets s’ils sont dans la seconde fourchette de 5m l’infini.

Si vous vouliez descendre plus bas que la distance minimum, et surtout si vous les trouvez, il existe deux compléments optiques : un « close-up » qui se fixe par clip sur l’objectif (diamètre de 23,5mm pour ceux qui veulent chercher). Ce complément permet de descendre à 1m – 1,5m et un complément portrait qui permet de descendre à 1,5m – 2m.

Il était encore prévu un filtre jaune à clipser sur l’objectif, le « Agfa Record Topaz Filter » de grade I ou II selon les effets que vous voudriez donner aux cieux de vos paysages. Le mode d’emploi précise qu’il existe une table avec les différents filtres et les corrections d’exposition et de vitesse. Avis aux chercheurs de raretés.

Alors si vous trouvez un de ces appareils en brocante, si on vous en donne un (comme celui-ci que j’ai reçu de Philippe de Pix-Visu et Pix-Academy, merci encore), si vous en trouvez un dans un vieux grenier familial, quelques petits points à vérifier :

  • lorsque vous l’ouvrez pour la première fois, c’est en douceur et en amenant les pliants jusqu’au bout de leur course, pour bien stabiliser le soufflet
  • ensuite, dans le noir absolu, ayant ouvert le dos de l’appareil, placez une lampe de poche puissante dans la chambre pour vérifier qu’il n’y a pas de trous, même minuscules. Sinon c’est la fuite de lumière qui ne pardonne pas. Si le soufflet est percé, c’est mal parti.
  • puisque l’appareil est ouvert, rallumez et vérifiez que l’obturateur s’ouvre bien quand vous pressez le déclencheur
  • enfin, vérifiez en faisant coulisser le curseur des distances que l’ensemble du bloc optique tourne dans un sens et dans l’autre. Parfois la graisse utilisée se fige et il est pratiquement impossible de débloquer le tout.

Voilà, si vous avez envie de vivre une expérience différente, c’est un bon appareil, facile à prendre en mains et à régler. Mais c’est un appareil qui demande un peu de temps pour l’apprivoiser et qui vous fera oublier la frénésie des appareils modernes et leurs rafales supersoniques. Ici vous avez le temps de peaufiner votre cadrage …

Ces Agfa Billy Record et leurs confrères de l’époque ont accompagné nombre de soldats dans les tranchées. Fidèles compagnons de galère, ils ont participé à écrire une partie de l’histoire de ces hommes plongés au cœur de l’horreur. Mal vus des commandements, ils montraient la réalité crue des combats, les petits moments de répit, la tristesse et parfois les joies toutes simples d’un instant de trêve. Ne les oublions pas, ce sont des témoins précieux.

Ce sont des appareils que l’on trouve encore assez facilement, pas toujours en bon état hélas. Ils se négocient pour une bouchée de pain (maximum 10 voire 15€ si la gaine en cuir accompagne le boitier).

Ceci étant, les images que délivrent cet Agfa Billy Record f7,7 ne sont pas désagréables : voyez des exemples ICI et LA.

Si vous voulez faire des expériences photographiques, c’est un bon instrument.

Petite video d’illustration :

Un peu de technique :

  • Agfa Billy Record 7,7
  • Type : pliant vertical d’Agfa
  • Année de lancement : 1933
  • Films : 120 films en rouleau, format d’exposition 6×9
  • Objectif : Agfa Anastigmat Jgestar f7,7/100 mm (trois éléments optiques) – distances de mise au point 2 à 5m et 5m vers l’infini
  • Obturateur : Prontor (Alfred Gauthier, Culmbach), vitesses 1/25s – 1/50s – 1/100 sec et pose B.
  • Ouvertures : f7,7 – f11 – f16
  • Poids : 560g
  • Dimensions : 165×88×37mm (fermé), 165×108×131mm (ouvert)


Pour le mode d’emploi, c’est par ICI.

Des références : https://www.danstacuve.org/test-agfa-billy-record-la-sensibilite-de-nos-aines/, en français ; http://camera-wiki.org/wiki/Agfa_Billy_Record

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