Les plus beaux (et utilisables) télémétriques à objectifs interchangeables (toujours à mon humble avis)

Après le petit exercice d’hier sur les télémétriques à objectifs fixes, passons à ceux dont vous pouvez changer la focale.

Ce sera plus compliqué car je pense faire une distinction entre les « anciens » et les « modernes » (histoire de rester dans la tradition de la polémique).

Et donc, au rang des anciens, je place dans l’ordre de mes préférences :

Le Zorki 1C, copie conforme du Leica 2. Il est généralement plus apprécié qu’un Fed 2 parce que sa fabrication en est plus précise et soignée. Soyons de bon compte, le viseur n’est pas pratique, ni la manière de le charger, tout comme sur les Leica de l’époque et il faut utiliser le zone focus pour prérégler l’appareil avant la prise de vue. Mais, équipé d’un Industar 22 dit rentrant, vous pouvez – réellement – le mettre dans une poche. Et quand vous le sortez, effet garanti pour les passants attentifs, qui généralement entameront la conversation, au point d’oublier que vous les avez mis en boite. L’utilisation d’une cellule est recommandée, soit à main, soit à placer dans la griffe porte flash (mais c’est moins joli). Mais son avantage décisif, c’est son prix, souvent autour des 100€ avec l’objectif, soit de 4 à 5 fois moins cher qu’un Leica IIIf (pour retrouver l’agrément d’utilisation)

Le Fed 1G , l’autre copie du Leica 2. Je ne vais pas répéter ce que je viens d’écrire car si la marque change, le résultat est le même. Et comme pour le précédant, le prix modeste vous permettra, le cas échéant, de vous offrir une belle optique, soit rentrante pour garder l’avantage de la compacité, soit fixe.

Le Leica IIIf, dit « l’original », qui est une évolution du même Leica 2 qui a servi de base aux 2 premiers cités. Fondamentalement qu’a t’il de plus ? Une fabrication plus complexe et plus soignée, un peu plus d’onctuosité dans les commandes. Pour le reste, il est aussi peu pratique pour la visée ou le chargement du film et c’est l’objectif qui fera la différence pour le rendu de vos photos, comme pour les deux premiers. Ah oui, il y a le prestige Leica et sa réputation de solidité et de réparabilité, qui existe aussi, rassurez-vous, pour les appareils russes (ICI). Toujours est-il que le prix s’en ressent, comptez environ 400€ pour un boitier nu.

Ces appareils font partie de l’histoire de la photographie en 35mm, initiée rappelons-le par les inventions d’Oskar Barnak tout d’abord de l’utilisation différente d’un film destiné au cinéma et ensuite de son Leica, premier vrai appareil compact et ultra transportable, modulable ensuite.

S’en servir pour photographier aujourd’hui, c’est accepter quelques contraintes (visée, chargement, réglage des vitesses, cellule indépendante) mais c’est prendre le plaisir de découvrir comment faisaient « les anciens » pour obtenir de biens belles images. Je dirais que c’est presque un état d’esprit.

Voilà, j’en viens à mes « modernes » que je présente par préférence, pas par date de fabrication :

Le Zeiss Ikon ZM qui est pour moi LE télémétrique absolu. Il est beau, pratique, ergonomique, léger, facile à charger, précis (cellule et visée), en un mot : moderne ! Vous pouvez y monter toutes les optiques en monture M et celles de Voigtländer, si elles sont – un peu – plus abordables que les Zeiss Leica, sont aussi proches de l’excellence. Même son prix, je vous le concède conséquent – comptez 1900€ nu – est pourtant encore un avantage car un Leica 7, son seul concurrent, est au triple de sa valeur.

Le Leica M5, car il est le vilain petit canard de la famille et que j’aime bien ces gens là ! Blague à part, c’est un excellent appareil, le premier à avoir proposé une cellule TTL précise et des réglages extrêmement faciles et rapides. Sauf pour le charger, ce qui se fait toujours par la semelle même si Leica a – un peu – facilité la tâche du photographe pressé. Forcément en monture M, vous pouvez tout lui monter dessus, même des russes comme le Jupiter 3 f1,5, avec une bague d’adaptation (mais pas le Jupiter 12, un grand angle qui rentre très fort dans le boitier). Il se négocie autour des 1000€ nu.

Le Canon P, contemporain du Leica M3 et M2, il a – pour moi – le gros avantage d’avoir aussi un magnifique viseur, collimaté du 35 au 100mm et surtout il possède un dos sur charnière. C’est un magnifique télémétrique, très bien dessiné et solide, qui accepte tous les objectifs en Ltm 39 dont des objectifs Canon qui sont excellents et peuvent aussi atteindre des prix pharaoniques (le f1:0,95 est himalayen !). Le boitier seul se négocie autour des 200€n ce qui le rend très abordable, vu sa qualité.

Et dans la famille des « modernes », il y a les appareils russes qui ont évolués, se détachant de leur modèle initial pour proposer parfois des solutions innovantes, que Leica utilisera 10 ans plus tard (p. ex. une cellule embarquée)

Le Zorki 6, qui est très compact, donne une bonne sensation de solidité (tout métal) et qui autorise – enfin – de pouvoir changer les vitesses quand on veut (appareil armé ou non). Il simplifie aussi le chargement grâce à son dos sur charnière. Mais son argument massue, c’est son prix : moins de 80€ avec un objectif ! Et comme il est toujours en monture Ltm 39 (Leica visant), le parc optique est immense et adapté à toutes les bourses.

Le Fed 3b, dont les commandes sont d’une onctuosité rarement atteinte, le déclencheur très discret (un petit flop) et assez facile à charger (dos amovible). Ce n’est pas le plus sexy de la bande mais il reste « sortable » et comme ici aussi vous pouvez monter ce que vous voulez comme optique en Ltm 39, vous n’aurez plus d’excuse pour ne pas l’essayer. D’autant que son prix n’est surement pas un obstacle : comptez autour des 60€ avec un Industar 61. Comme pour le premier cité, n’oubliez pas votre cellule à main

Le Fed 4b, bon d’accord, il n’est pas beau mais 10 ans avant Leica, il nous sortait une cellule intégrée au boitier. Pas encore couplée, mais vous l’avez sous les yeux et vu ce qu’elle était chargée en sélénium, elle résiste au temps, pour autant que vous la couvriez ou utilisez le « sac tout prêt » en cuir généralement vendu avec l’appareil. Ses commandes sont très douces et il est discret … enfin, autant qu’une armoire normande puisse l’être ! Même son prix n’est pas une excuse : comptez environ 40€ pour un appareil fonctionnel avec un objectif 50mm.

Un outsider enfin, le Zorki 4 ou le Zorki 4K, qui fut sans doute le télémétrique le plus fabriqué au monde. Ce n’est pas le plus beau mais il bénéficie d’un beau viseur, clair, avec correction dioptrique, son levier d’armement, agréable et plus facile que de tourner un bouton (le Zorki 4), sa discrétion au déclenchement (un flop très doux). Pas trop onéreux (comptez 60€ avec objectif), il semble faire le lien entre l’ancienne génération de par sa forme et la nouvelle puisqu’il fut fabriqué jusque dans les années quatre-vingt.

Si vous voulez voir de quoi il est capable, je vous invite à découvrir ce site car le photographe utilise un Zorki 4 pour ses sorties de Street photography.

« Mais, me direz-vous, quel attrait pour l’utilisation de ces appareils où tout est manuel ? »

Mais celui de la différence, celui de la recherche esthétique (bon, ok par pour le Fed 4b, on est d’accord) et – surtout – celui du temps que l’on accepte de consacrer à sa passion, celle de faire des photos, pensées, réfléchies, voulues ou non pas prises à la sauvette comme je le vois si souvent avec les « dégaineurs » de smartphone ! Utiliser un télémétrique, c’est comprendre comment l’appareil devient le prolongement de votre regard, naturellement, car la visée peut se faire les deux yeux ouverts pour « capter » l’air du temps qui va précéder le moment où vous appuierez sur le déclencheur.

Un célèbre exemple est le travail de Henri Cartier-Bresson (HCB pour les intimes) qui humait l’endroit avant de figer l’instant désiré. Même s’il fut reporter et pas des moindres (co-fondateur de Magnum), il savait anticiper l’espace et le temps qui allait donner l’image, même dans les situations d’urgence.

Un dernier mot encore, peut-être : si ces appareils acceptent différentes optiques, généralement du 28 au 135mm, souvent vous vous contenterez de celle qui vous correspond le mieux. Ce peut être du 50mm (le plus proche de la vision humaine) ou du 35mm qui offre des plans plus larges ou qui vous oblige à aller au plus près du sujet. Cela fait partie de l’expérience télémétrique.

Je vous souhaite donc de belles découvertes.

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