Le Yashica Minister III

Une belle trouvaille, comme d’habitude sur un stand de brocante. Et pourtant je m’étais dis « plus de Yashica », les ayant déjà pas mal présentés.

Mais c’était sans compter sur un monsieur qui, ayant parcouru la liste des appareils à vendre, m’a un jour demandé si je ne vendais pas un Minister III.

-« Ben non, je n’en ai pas »

Alors, quand j’ai vu celui-ci, vous me connaissez …

Et ça tombe bien car je ne savais absolument rien de ce modèle. J’ai eu quelques Electro 35, que vous pourrez retrouver de-ci de-là sur le site, et un Minister D. Je ne voyais pas trop où se situait celui-ci.

Un peu d’histoire ne fera pas de tort : alors dans la famille des Minister, nous avons en premier le Minister (1960), puis le Minister II, le Minister D (1963), le Minister 700 (1964) et enfin le Minister III (1966). 

Admettons que le modèle ne révolutionne pas le monde des télémétriques des années soixante, mais il a ce côté rassurant et robuste des appareils où le métal est roi.

Son architecture est classique : le viseur à gauche, une fenêtre pour le télémètre au milieu, un objectif assez imposant au centre de la façade, le capteur de la cellule sur le pourtour de l’objectif (et on peut visser un filtre devant).

Qui dit capteur en nid d’abeille pour la cellule suppose immanquablement une cellule au sélénium. L’ avantage de celle-ci est qu’il n’y a pas de piles car le sélénium produit le courant nécessaire au fonctionnement du posemètre. Le hic, c’est qu’à la longue, elle peut s’épuiser surtout si l’objectif n’a pas été protégé par un bouchon ou l’appareil placé dans un sac noir.

Ici, j’ai de la chance, elle fonctionne parfaitement.

Le posemètre donc analyse la lumière sans énergie extérieure et il vous transmet une information via une aiguille qui se place en face d’une valeur, que vous reporterez sur le fut de l’objectif pour avoir l’exposition correcte. Notez la petite fenêtre devant, elle sert à régler la sensibilité selon le film utilisé, en Asa.

Regardez la bague de l’objectif avec les marques qui reprennent les valeurs données par la cellule, j’y reviendrai. Notons que l’obturateur est un Citizen (par un Copal comme sur les Electro 35).

Nous avons donc là un appareil tout mécanique.

Puisque nous écrivions au sujet de l’objectif, c’est un Yashinon de 45mm qui ouvre à f2,8. On a connu, plus tard, des objectifs plus lumineux mais il est loin d’être dépassé et il est net dès la pleine ouverture, surtout si vous êtes près de votre sujet. Les Yashinon ont une excellente réputation.

C’est un appareil qu’on a rapidement en mains, il n’y a pas pléthore de commandes ou boutons : sur le capot supérieur, un déclencheur devant les indications et réglages de la cellule, un ré-armeur tout en métal, une molette pour le rembobinage tout à gauche et au milieu, une griffe porte-accessoires nue. Et tout à fait à droite, la petite fenêtre du compteur de vue (qui se réinitialise quand on ouvre le dos de l’appareil).

Ici on voit bien le détail du bouton pour régler la sensibilité (de 10 à 400 Asa) et l’échelle de valeur (EV de 4 à 18) que le posemètre indique, qui seront reportées sur l’objectif.

Si vous utilisez une cellule à main, ou le flash, vous ne tiendrez pas compte des indications du posemètre et le boitier ne vous en voudra pas, il déclenchera, la cellule n’est pas couplée et donc pas contrariante.

Dès que vous portez l’appareil à votre œil, vous plongez dans un viseur somme toute assez large, lumineux, avec des lignes de cadre bien visibles et correction de la parallaxe. Avec, au centre, un « patch » jaune, celui du télémètre, qui est couplé à l’objectif (ce qui veut dire que lorsque vous actionnez la bague de réglages de distance de l’objectif, vous voyez le résultat dans le viseur).

L’obturateur, central, est ici un Citizen, sans autre précision. De prime abord, il semble grand comparé aux Compur et Prontor contemporains.

Sur l’objectif vous trouverez 3 bagues de réglages :

  • la plus large, contre le boitier, est celle du réglage de la mise au point
  • la seconde, presque au milieu, est celle des vitesses
  • et la dernière, avec les chiffres rouges, est celle de l’indice de lumination (EV) relevé par le posemètre.

La bague de mise au point commence à 80cm vers l’infini. Curieusement, il n’y a pas de marqueur de la position, sans doute parce que l’utilisateur du télémètre n’en a pas besoin. Elle est notée en mètres et en pieds.

La bague des vitesses s’échelonne de 1s au 1/500s plus la pose B, classique. Le retardateur, car il y en a un, est actionné par la tirette en dessous de l’objectif. Attention, pour éviter les soucis, armez d’abord avant d’actionner le retardateur, ça évite de bloquer les mécanismes.

Enfin, la dernière bague, notée en rouge, est celle où vous reporterez le chiffre donné par la fenêtre du posemètre. Bizarrement, la bague commence par un deux alors que la fenêtre, en haut, ne commence qu’à quatre.

De fait, le réglage de la bague donne une gamme de vitesses et d’ouvertures : lorsque vous reportez le nombre EV donné, vous pouvez tourner la bague du milieu, ce qui modifie la vitesse et modifie également l’ouverture pour que l’exposition soit gardée.

Si vous regardez bien dans la petite fenêtre qui est juste derrière la bague des vitesses, elle indique l’ouverture déterminée par le couple vitesse/EV.

Il n’y a pas d’intervention directe possible sur l’ouverture. Ce qui signifie que si vous voulez en déterminer une particulière, vous devrez « jouer » avec la bague des vitesses pour la fixer.

La petite fenêtre qui indique l’ouverture déterminée par le couple vitesse/EV.

Toujours autour de l’objectif, tout devant, un magnifique « nid d’abeille », qui est le capteur du posemètre. Un capteur au sélénium qui, je le rappelle, vous dispense de mettre des piles dans l’appareil, le sélénium produisant le courant nécessaire en se nourrissant de la lumière qu’il reçoit.

Ici, comme pour tous les posemètres au sélénium, une seule règle à retenir : les maintenir dans l’obscurité d’un bouchon d’objectif ou, au pire, d’un sac tout-prêt, voire d’une pochette pour les garder en forme le plus longtemps possible.

J’ai longtemps crû que les boitiers qui possédaient ces cellules n’étaient pas dignes d’intérêt car risquant rapidement de me faire défaut. Or, avec un minimum de précautions (et parfois seulement de la « crasse » accumulée depuis des années), ces cellules fonctionnent encore soixante ans plus tard pour beaucoup.

Ce dispositif a deux avantages : il pointe dans la direction de l’objectif, donc de la visée et ensuite on peut généralement monter un filtre devant et le calcul du posemètre en tiendra compte.

Et pour en terminer avec l’objectif proprement dit, il s’agit d’un Yashinon-DX, soit un objectif traité multicouches. Constitué de cinq éléments en quatre groupes. C’est un 45mm, très proche de ce que perçoit l’œil humain. On pourrait objecter qu’une ouverture de f2,8 n’est pas très rapide mais rares sont les occasions où l’on ouvre à cette valeur, du moins en street photography, là où ce boitier excelle.

Je reviens aussi un moment sur la griffe porte-accessoire ou flash. Il n’y a pas de synchro mais bien une prise PC, tout à gauche du boitier.

Finalement, en dessous, le petit bouton pour permettre le rembobinage, le filetage pour un trépied, bien mis au milieu, sous l’objectif (bon équilibre et stabilité) et un curieux bouton pour déverrouiller le dos : il faut appuyer dessus en le tirant vers le bas. Pas facile, mais sans doute un manque d’habitude aussi. Ce système se retrouve sur d’autres boitiers de la marque, comme les Lynx.

Allez, petite revue en images :

Que penser de ce Yashica Minister III ?

Il respire la qualité des appareils de la fin des années 50 et ceux des années 60 : corps bis-tons, tout en métal.

Toutefois, si on le compare avec un Canonet, qui possède une cellule couplée, sorti en 1961 (soit deux ans avant le Yashica), il pourrait paraître dépassé. Il n’en demeure pas moins un appareil fiable et fait pour durer.

Pour les « puristes », ajoutons qu’il sera fabriqué au Japon (inscription Japan derrière et 7 chiffres dont les 2 premiers sont l’année de fabrication) et à Hong Kong la même période (marqué H plus 6 chiffres- comme sur l’exemplaire ici). Mais quelques uns seront fabriqués à Hong Kong et marqué Japan. Le modèle de vis devrait les départager : têtes fendues pour le Japon, cruciforme à Hong Kong. Quoique le mien soit noté H …. et a la vis fendue (dur, dur la vie de collectionneur pointu) !

Pour conclure, voici un bel appareil qui, pour un prix raisonnable, donnera encore beaucoup de plaisir à celui qui va l’acquérir. Et je comprends dès lors mieux la personne qui m’avait contactée, le sien étant tombé en panne après bien des années de loyaux services.

Comptez dans les 40€ pour un très bel exemplaire.

La seule chose qui va décontenancer un peu, c’est la « gymnastique » avec les nombres EV mais une fois qu’on a compris comment ça fonctionne, c’est très facile et finalement rapide d’usage.

Alors, si vous avez la chance d’en trouver un sur votre route, faites un brin de chemin ensemble, il vous le rendra bien.

Des exemples de photographies prises avec cet appareil ICI.

Publicités d’époque (merci Collection-appareils)

Grenier-Natkin, 1967
Photo-Hall, printemps 1968. Revue intéressante des concurrents de l’époque.

Videos d’illustration

Un peu de technique :

Objectif Yashinon 45mm f2.8
Mise au point télémètrique
Cellule au sélénium

Obturateur Cityzen de 1s au 1/500 s + B
Gamme ASA de 10-400
Filetage du filtre de 55 mm

Des références : https://www.k2-photography.dk/yashica-minister-iii-review/, http://camera-wiki.org/wiki/Yashica_Minister_III, https://web.archive.org/web/20180517200504/http://www.kyphoto.com/classics/yashicaminister.html, https://oldcamera.blog/2014/10/04/yashica-minister-iii/, https://austerityphoto.co.uk/yashica-minister-iii-review-back-to-the-60s-in-style/, http://www.yashica-guy.com/document/chrono2.html (la bible), https://yashicasailorboy.com/tag/yashica-minister-iii/ en anglais; https://www.collection-appareils.fr/x/html/appareil-1363-Yashica_Minister%20III.html, https://www.collection-appareils.fr/x/html/appareil-860.html, https://www.collection-appareils.fr/x/html/appareil-1364.html, https://www.folding-camera.fr/yashica-minister-iii.html, https://www.mes-appareils-photos.fr/Yashica-Minister_III.htm en français

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