Le Kodak Instamatic 28

Alors, celui-là, je l’ai (re)trouvé dans ma « caisse à brol » !

Entendez par là une grande caisse dans laquelle je retourne parfois car j’y ai entassé toutes sortes d’appareils recueillis souvent par hasard (des lots, des appareils reçus, trouvés, etc.).

Et donc, dans cette grande caisse, une boité jaune me fait de l’œil : celle d’un Kodak Instamatic 28.

Elle est neuve et ce qu’elle contient aussi : l’appareil n’a jamais été utilisé !

-« Kodak, mais c’est pas la firme qui faisait des films dans le temps ? »

Il n’y a sans doute que les moins de vingt ans pour ne pas connaître la célèbre marque jaune.

Je ne vais pas vous raconter l’histoire de la marque, vous en trouverez des résumés très bien faits ICI et LA.

Retenons simplement que c’est grâce à Monsieur George Eastman et son génie des affaires que la photographie est devenue, très tôt, accessible au plus grand nombre.

J’écris « très tôt » car nous sommes en 1888, lorsqu’il crée le nom KODAK, qui ne veut rien dire mais fonctionne partout dans le monde. Grâce à l’invention du film « facile » – c-à-d. un film photographique sec, transparent et flexible, en rouleau – simple à utiliser mais aussi de l’appareil photo qui va avec, un appareil en carton, préchargé de 100 expositions, facile à transporter et à manipuler, résumé par un slogan publicitaire génial « You press the button, we do the rest » (Vous appuyez sur le bouton, nous faisons le reste), il invente la photographie amateur.

source : Histoire des inventions

L’idée fantastique c’était de rendre le client « captif ». Par exemple, reprenons le premier appareil chargé de 100 vues : lorsque vous les aviez terminées, il suffisait de retourner l’appareil chez Kodak à Rochester, New York, où on développait le film et on vous renvoyait les photos tirées et l’appareil, rechargé. Le cycle recommençait.

Tout au long de l’histoire de l’entreprise, le même principe sera gardé : mettre à la disposition des clients des appareils simple d’utilisation, en grand nombre, pour diminuer les coûts, rendre accessible au plus grand nombre et pouvoir vendre des pellicules.

Cela a tellement bien fonctionné que même des appareils « bon marché » comme le Diana, distribué comme cadeau avec des produits ou services, ont été supplanté par les Kodak, notamment les Instamatic, vendus à des millions d’exemplaires.

Le premier Instamatic a été le 50, vendu en Angleterre en février 1963, soit un mois avant le modèle 100, lancé lui aux USA, qui sera le plus connu (et vendu).

La vitesse est de 1/90s, fixe, tout comme l’ouverture et la mise au point. Un système de flash sera ajouté au 100.

D’année et année, les appareils évolueront, par (toutes) petites touches. Il y aura même des modèles automatiques (série 800/804) vers la fin.

Pour vous donner une idée, un ordre de grandeur, plus de 50 millions d’Instamatic seront vendus entre 1963 et 1970, sous 80 modèles différents.

Et là, je ne vous parle que des appareils à cassette 126 car les Instamatic auront encore une longue carrière, jusqu’en 1990, avec les pockets (1972) qui utiliseront les films en cassette 110mm. 23 autres millions d’appareils seront vendus.

Si vous avez suivi – et je sais que vous êtes attentifs – Kodak a toujours voulu développer des appareils simplifiant la vie des photographes amateurs. Il a inventé le film souple en 135mm, en rouleau puis en bobine (les cartouches jaunes que tous les photographes de plus de 30 ans ont connu).

Et pour les Instamatic, il a développé un film en cassette, encore plus simple à utiliser : la cassette en 126 .

Une cassette en plastique dans laquelle un film en 135mm, dont on a modifié les perforations et doublé d’un papier qui reprend les données utiles (flèches indicatives, numéro de photo), permet de faire des photos au format 28x28mm. Avec elle, plus besoin d’insérer une amorce dans une bobine réceptrice, plus ou moins facilement : on ouvre le dos de l’appareil et on place la cassette dedans, on referme et c’est tout.

Kodak 126 open dropin shoot 700
source : Philcameras

La conception de la cassette protège parfaitement le film. Lorsqu’on arrive au bout, il est « absorbé » dans la partie où il s’enroule, pour éviter les fuites de lumière qui voileraient le film.

Au labo, il faudra casser la cassette pour en extraire la pellicule et la traiter.

L’appellation originale, sous laquelle la cassette 126 a été enregistrée par Kodak est le Kodapak.

C’est Hubert Nervin qui est à l’origine de cette invention, qu’il céda ensuite à Kodak. Elle fut inventée pour simplifier à l’extrême le chargement du film dans l’appareil, chose qui semblait effrayer les plus néophytes et les photographes vraiment amateurs (ceux qui ne faisaient que quelques photos par an).

Le film de 135mm est enroulé dans la cassette, avec un papier protecteur qui autorise la fenêtre prévue dans la cassette pour voir le nombre de vues effectuées (pas de compteur sur les appareils dès lors). L’avantage, puisque la cassette est asymétrique, c’est qu’on ne peut pas la monter à l’envers et que si, par inadvertance, on ouvre l’appareil, seule la photo « en cours » sera voilée, les autres étant protégées par la cassette et le papier qui est enroulé autour.

source :Kodak

Pour simple que cela paraisse, cette cassette a également incorporé l’un des premiers systèmes de détection de vitesse de film mécanique largement utilisés : à l’aide d’encoches sur la cassette, une vitesse de 64, 80, 125 ou 160 ASA est indiquée au boitier et permet de régler le mécanisme d’exposition de l’appareil photo. Soyons de bons comptes, toutes les appareils n’ont pas profité de cette fonctionnalité.

source : Kodak

Si la formule est attrayante, elle a quand même un grand inconvénient : la planéité du film ne peut être assurée car, prisonnier dans la cassette, il ne peut avoir de presse film efficace qui « plaque » la pellicule devant la fenêtre de la chambre.

Cette particularité n’avait pas trop d’importance dans les appareils Instamatic, extrêmement simplifiés (peu de réglages de vitesses, d’ouvertures). La « qualité » relative de ces appareils ne souffrait pas des inconvénients de la cassette 126.

Pour être complet, 4 reflex ont tenté l’aventure de la cassette 126 : le Contaflex 126, le Ricohflex, le Rollei SL 26, et le Kodak Retina Reflex Instamatic. Si les défauts de planéité étaient gommés par la faible qualité des optiques des Instamatic, avec des appareils plus « haut de gamme », ce n’était pas le cas. Ces appareils n’ont pas eu de succès.

Kodak a fabriqué cette cassette 126 de 1963 à 1998. Mais les dernières ont été fabriquées jusqu’en 2008 par la société Ferrania avec des pellicules Solaris.

Donc, à moins de tomber sur un stock, forcément périmé, de cassette 126, si vous voulez réutiliser vos vieux appareils – et ce serait dommage de ne pas le faire – vous devrez vous tourner vers des adaptateurs qui utilisent une pellicule en 135mm (il s’en vend sur Ebay p.ex. ou vous pouvez les « fabriquer » avec une imprimante 3D).

Ce qui a précipité la fin de la cassette 126 fut d’une part que les appareils photos des années quatre-vingt étaient pour la plupart pourvu de motorisation qui « chargeait » automatiquement les films et ensuite la mise sur le marché d’appareils jetables, préchargés d’une pellicule 24×36, qui avaient les mêmes qualités, sinon plus, que les appareils Instamatic ou Agfamatic.

Voilà, voilà … vous en savez plus maintenant sur ce « drôle » de film qui alimentait les Instamatic , et les Agfamatic, le concurrent de toujours qui dut faire « allégeance » au géant américain pour ce film.

Bon, et cet Instamatic 28 alors ?

Il est apparu en Grande-Bretagne en 1972 et il a sévit jusqu’en 1974.

Au pays des appareils simples, il est simplissime !

Un viseur sans aucune marque, un objectif ménisque (une seule lentille) de 43mm ouvrant à f11 avec mise au point fixe. Pas de griffe flash ni possibilité de greffer un flash cube comme sur ses petits camarades.

La seule chose que vous pouvez régler, c’est le diaphragme avec deux positions : soleil et soleil voilé.

Vous pouvez rarement vous tromper même si Kodak a prévu un mode d’emploi !

Un petit loquet en bas sur la tranche droite de l’appareil libère le dos, dans lequel vous glisserez la cassette. Vous armez avec le gros levier, au dessus. Selon la luminosité, vous réglez le diaphragme, vous visez et vous appuyez sur le bouton (une barrette) au dessus de l’appareil : clic-clac, c’est dans la boite !

Voilà, voilà … avouez que si je n’avais pas (un peu) brodé avant la présentation de cet Instamatic 28, je n’aurais pas eu grand chose à vous écrire.

Notez qu’il y a plus fort que moi, c’est le gars qui a tourné une video de plus de 5 minutes sur cet appareil !

A la question légitime « cet appareil est-il intéressant si on veut l’utiliser ? », je suis très tenté de vous répondre « non ». A moins d’en découvrir un dans l’état de celui que je vous montre, avec sa boite et neuf, ce qui peut faire le bonheur d’un collectionneur (d’un musée ?), cet appareil est très limité.

La gamme des Instamatic est suffisamment large que pour y trouver son bonheur. Voyez les 233, les 154 et leur drôle de moteur à ressort, les 324 et leur objectif ouvrant à f2,8, les 104 sur lesquels vous pouvez au moins adapter un cubiflash, ou les 355 X avec cellule CdS, par exemple (liste non exhaustive).

Le mode d’emploi

Si vous voulez tenter l’aventure de mettre du 135 en cassette 126, voici deux videos d’exemples (à faire en chambre noire bien évidemment).

La maison ne recule devant aucun bricolage pour que vous puissiez utiliser vos anciens Instamatic !

Les données techniques

Période de production : 1972-1974 – Angleterre
Type : compact
Format : 28×28 mm sur chargeur 126
Viseur : clair non collimaté
Objectif : ménisque 1:11 f=43 mm – mise au point fixe
Mesure de l’exposition : sans
Réglages : diaphragme soleil et soleil voilé
Sensibilité du film : 25 à 125 ASA
Obturateur : central à une seule vitesse
Déclencheur : sur l’obturateur
Flash : sans
Griffe : sans
Ecrou de pied : non
Armement : levier à une seule manœuvre
Ouverture du dos : par poussoir sur le côté
Dimensions : 108 x 67 x 52 mm
Poids : 177 g

Des références : http://camera-wiki.org/wiki/Kodak_Instamatic_28, https://filmphotography.eu/en/kodak-instamatic-28/, https://kodak.3106.net/index.php?p=207&cam=1185, http://Cet appareil photo fabriqué au Royaume-Uni est le seul modèle européen de la gamme à ne disposer d’aucune installation de flash, bien qu’il existe des paramètres « ensoleillé » et « nuageux ». https://kodak.3106.net/index.php?p=207 en anglais, http://fexmania.fr/picture.php?/1146, http://www.cameraboussat.fr/dossier_collection/cible_g.php?id=9&type=Instamatic, https://www.philcameras.be/collection/collectionm/ijk/kodakm/instamatic126m.html, https://www.mes-appareils-photos.fr/Menu-Intamatic.htm en français

2 commentaires sur “Le Kodak Instamatic 28

  1. Comme je te l’ai déjà dit, j’ai conservé mon Instamatic 233 avec lequel j’ai fait mes premières photos quand j’étais (tout) petit.
    Inutile d’insister, il n’est pas à vendre ! 😀
    Belle soirée, Jean-Pascal.

    • Bonjour Phil, nous avons tous un appareil fétiche, que l’on a gardé précieusement, souvent matériellement, parfois juste en mémoire mais il fait partie des « actes fondateurs » de notre passion. Mes amitiés.

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